Etudes & Opinions

January 3, 2023

Tribunes
L’ESG : Un combat noble inflationniste

En quelques années, l’ESG est passé d’un acronyme obscur à une préoccupation universelle. Cette prise de conscience généralisée des ressources limitées de la planète est salutaire.

Cependant, l’expérience montre que le constat est une chose, la mise en place de solutions en est une autre. La boussole naturelle de notre système économique est l’optimisation des profits plutôt que la préservation des ressources naturelles.

Infléchir nos habitudes nécessite de légiférer pour réduire les comportements nocifs (amendes) et récompenser les initiatives de transition (subventions).

L’arsenal législatif s’est beaucoup renforcé en 2022. C’est encourageant pour la planète mais c’est aussi une nouvelle source d’inflation à long terme. Résoudre le défi du réchauffement climatique revient à limiter l’utilisation des ressources naturelles et dépolluer notre système énergétique. Dit autrement, nous devons réduire et reconstruire l’offre alors que la demande est en croissance. C’est un processus naturellement inflationniste.

Lors des dernières semaines, l’Europe a pris plusieurs décisions qui illustrent notre propos. L’une d’entre elles porte sur la chaîne d’approvisionnement de matières premières importantes comme l’huile de palme, le café, le cacao, le lait, le caoutchouc… Désormais, les producteurs de ces matières devront prouver que leur culture n’a pas été réalisée sur des terres issues de la déforestation. L’Europe prévoit des amendes qui iront jusqu’à 4% du chiffre d’affaires en cas d’infraction à cette réglementation. En clair, cela devient moins facile et donc plus coûteux de cultiver ces matières premières. Cela sera donc répercuté dans des prix structurellement plus élevés.

Lors de la COP15 sur la biodiversité, mi-décembre, 195 pays se sont mis d’accord sur un objectif majeur : la protection de 30% des espaces terrestres et 30% des espaces marins d’ici à 2030, contre respectivement 17% et 8% aujourd’hui. Cette ambition est nécessaire pour ralentir la déforestation et endiguer la pêche abusive par exemple. Mais c’est un cas évident de réduction de la taille de l’offre alors que la demande augmente, tirée par la croissance de la population mondiale. Pour éviter une tendance inflationniste il faudrait anticiper une forte augmentation de la productivité de cette offre réduite. Mais rien n’est moins sûr. Si nous pouvons nourrir près de 8 milliards d’être humains, c’est essentiellement car nos rendements agricoles ont augmenté exponentiellement ces 50 dernières années. Mais nous devons ce prodige principalement à la consommation des engrais qui a été multipliée par neuf depuis 1960. Or ces engrais font partie du problème car leur production et leur utilisation contribuent significativement au réchauffement climatique. En utiliser plus n’est pas la solution, Il est donc très probable que ce nouvel objectif de protection des terres et des mers soit inflationniste à long terme.

En décembre encore, l’Europe a aussi entériné la réforme du marché européen des droits carbone (ETS), un troisième exemple de pression inflationniste. Ce nouvel accord a deux conséquences. Premièrement, une augmentation du coût des émissions de CO2 pour les entreprises avec la réduction progressive des quotas d’émission gratuits. Deuxièmement, l’élargissement de ce « coût CO2 » à de nouveaux secteurs comme le transport routier et maritime ou les bâtiments. Pour simplifier il y a donc une partie grandissante de l’économie qui supportera des coûts de production plus élevés. Cela risque d’être reflété dans une hausse des prix de vente et viendra nourrir l’inflation structurelle.

L’analyse des causes et conséquences de la très forte inflation de 2022 montrera une combinaison de facteurs temporaires et structurels. Parmi ces derniers, l’ESG est rarement cité. La législation qui s’élargit et se durcit progressivement est pourtant significative et durable. Atténuer le réchauffement climatique est un combat noble mais inflationniste.

December 9, 2022

Lettre de la gestion
Lettre ESG - Bon pour la planète, bon pour l'actionnaire

Bon pour la planète, bon pour l’actionnaire

Dans cette note, nous faisons la synthèse de nos entretiens récents avec plusieurs des sociétés en portefeuille. Cet échantillon représente environ 50% de l’empreinte carbone (Scope 1&2) des portefeuilles de BDL Convictions, fonds PEA, et BDL Rempart. Nous avons cherché à comprendre le niveau d’ambition, de transparence et de crédibilité des stratégies climat de ces entreprises et en avons tiré plusieurs enseignements que nous partageons avec vous.

Rencontres avec les entreprises de BDL Convictions et BDL Rempart

Chez BDL, nous avons une approche ESG qui se veut concrète, factuelle et utile, « ESG utile ».Nous utilisons les méthodes que nous avons développées sur l’analyse financière : la compréhension des modèles économiques et la proximité avec les entreprises que nous avons en portefeuille. Au-delà de la qualité de leur management et de leur gouvernance, nous nous intéressons particulièrement à leur stratégie climat et plus spécifiquement à la réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre (GES). Nous estimons que, pour les sociétés qui ne font pas l’effort de se décarboner, le risque climatique peut altérer significativement leur valeur à long terme. Des risques de perte de parts de marché, de durcissement de la réglementation, de dépréciations d’actifs tangibles ou intangibles, d’augmentation du coût du capital ou encore de pour suites juridiques peuvent se matérialiser et diminuer durablement leur rentabilité. En tant qu’actionnaires responsables, nous attendons une stratégie climat transparente et ambitieuse de la part de nos entreprises. Plus précisément, nous souhaitons qu’elles reportent au CDP, qu’elles présentent un plan de transition crédible et qu’elles publient des objectifs sur les Scopes 1, 2, et 3 qui soient validés par le SBTi. Dans cette note, nous faisons la synthèse de nos entretiens récents avec plusieurs des sociétés en portefeuille. Cet échantillon représente environ 50% de l’empreinte carbone (Scope 1&2) des portefeuilles de BDL Convictions et BDL Rempart. Nous avons cherché à comprendre le niveau d’ambition, de transparence et de crédibilité des stratégies climat de ces entreprises et en avons tiré plusieurs enseignements que nous partageons avec vous. Etant donné l’importance du sujet, nous répèterons cet exercice a minima une fois par an.

QUELQUES INDICATEURS CLÉS :

Les entreprises que nous avons rencontrées représentent un total de 60 millions de tCO2(Scope 1&2) et 1,4 milliards de tCO2 Scope 3. Ainsi le Scope 3 représente 99% des émissions. Il est fortement tiré à la hausse par Total Energies, Siemens et Airbus. Cependant, même en enlevant ces trois noms, le Scope 3 constitue encore 84% des émissions déclarées. Nous avons donc étudié les 3 scopes en détail. Tout d’abord, nous avons comparé les sociétés sur quelques initiatives clés. La première est leur reporting au questionnaire CDP « climate change » et le score obtenu. Concernant la transparence sur la publication des émissions de GES et la stratégie climat, le CDP est de loin la référence au niveau mondial, selon nous. Nous constatons que toutes nos entreprises ont répondu au questionnaire et plus de 75% d’entre elles ont obtenu A, le meilleur score possible.

Nous avons ensuite regardé le niveau d’ambition de leurs objectifs de réduction de GES en utilisant les données de la Science Based Target Initiative (SBTi), là encore la référence mondiale en la matière. Pour rappel, SBTi analyse les objectifs de réduction de GES à horizon2030 et 2050 et les valide comme suivant une trajectoire compatible avec un réchauffement à2°C ou 1,5°C. 70% de nos entreprises ont des objectifs validés SBTi, 10% sont engagées et attendent la validation, et 20% sont dans des secteurs où SBTi n’a pas encore publié de méthode pour évaluer les objectifs (pétrole et chimie). De plus, quand elles ont leurs objectifs validés, la plupart ont choisi la trajectoire la plus ambitieuse de 1,5°C. Entre les scores au CDP et les objectifs validés SBTi, les résultats ont bien supérieurs à la moyenne des sociétés européennes, cela est rassurant quant à la crédibilité et le niveau d’ambition de la stratégie climat de nos entreprises. Même si les chiffres varient d’une entreprise à l’autre, les objectifs de réduction, d’ici 2030,sont de l’ordre de 40 à 60% sur les Scope 1&2 et de 15-20% sur le Scope 3. Nous notons aussi que toutes nos entreprises ont un objectif de réduction Scope 3 et pour la très grande majorité d’entre elles, les objectifs Scope 1&2&3 sont en absolu et non en intensité. Même si aucune méthode n’est parfaite, chez BDL nous privilégions des objectifs en absolu car c’est ce dont la planète a besoin in fine.

ANALYSE DES SCOPES 1 & 2

Une fois les grands agrégats bien étudiés, nous avons utilisé nos entretiens pour mieux comprendre les leviers et les défis rencontrés dans la bonne exécution de ces stratégies.

Une maîtrise des variables du Scope 1

Sur les Scope 1&2, même si les objectifs de réduction sont ambitieux, nos entreprises ont semblé très confiantes car elles maîtrisent les paramètres. Les leviers du Scope 1 sont connus :

→Baisse de la consommation énergétique de l’outil industriel

→Electrification des processus

→Remplacement du charbon par le gaz et décarbonation du gaz par le biogaz et l’hydrogène pour les processus qui ne peuvent pas être électrifiés

Ainsi, Total Energies, qui a un Scope 1 de 34mn de tCO2, a annoncé un plan de capex de $1milliards pour améliorer l’efficacité énergétique de ces procédés industriels. Verallia a décidé de remplacer un four au gaz par 2 fours électriques. Ce projet est une première dans l’industrie et vise à réduire de moitié les émissions de CO2. Saint-Gobain a fait tourner pendant une semaine une usine de verre plat 100% recyclé avec du biogaz et de l’énergie renouvelable, montrant que le verre plat zéro carbone en Scope 1&2 est faisable. Vinci comme Eiffage travaillent sur la décarbonation de leur flotte de véhicules et d’engins en migrant progressivement vers de l’électrique.

Scope 2 : une accélération de la demande pour de l’énergie renouvelable

Sur le Scope 2, la décarbonation de l’électricité utilisée par nos entreprises est en marche. Toutes ont des objectifs élevés de consommation d’électricité décarbonée sur les prochaines années (ex. Airbus vise 100% d’ici 2024, JDE Peet’s passe de 17% en 2021 à 40% au H2 2022).Pour parvenir à leurs objectifs, certaines entreprises mettent en place des projets solaires ou éoliens pour alimenter leurs propres besoins en électricité (ex. Total Energies), d’autres signent des PPA (Purchase Power Agreement) ou achètent des Garanties d’Origine (ex. Covestro, Airbus, Vivendi). Les PPA sont des contrats d’achat d’électricité issue d’énergies renouvelables qui s’exercent sur le moyen ou le long terme (de 5 à 20 ans). Les clients qui les contractent accèdent à une énergie verte, fiable et certifiée, à un prix défini et stable. La plupart des entreprises mentionnent cependant qu’il est compliqué de signer des PPA en Europe car il y a un manque de capacité et les projets mettent du temps à émerger. Le risque est donc d’abuser des Garanties d’Origine pour « verdir » rapidement la consommation d’électricité sans pour autant que cela soit additif aux capacités existantes d’énergies renouvelables. Nous resterons donc attentifs sur le sujet. En tant qu’actionnaires, nous avons une préférence marquée pour les PPA car ils déclenchent un vrai développement de nouvelles capacités d’énergies renouvelables et couvrent les entreprises contre les variations du prix de l’électricité. Les Garanties d’Origine ne sont qu’un certificat qui atteste que de l’énergie renouvelable a été produite quelque part. Il n’y a souvent pas de traçabilité ni d’additionnalité (création de nouvelles capacités).

SCOPE 3 : ENCORE BEAUCOUP D’HÉTÉROGÉNÉITÉ

Concernant le Scope 3, les états d’avancement et les pratiques déployées sont moins homogènes. De même, les défis peuvent être très différents. Pour certaines entreprises, l’essentiel du Scope 3 est en amont et porte sur la chaîne d’approvisionnement, principalement les matières premières (ex JDE Peet’s avec le café). Pour d’autres c’est le Scope 3 aval qui est clé (ex. Vinci et Eiffage avec les autoroutes, Airbus et Siemens avec l’utilisation des avions et des trains, Total Energies avec la combustion du pétrole).

Scope 3 amont : Fiabiliser la comptabilité fournisseurs

Sur le Scope 3 Amont, nos entreprises recensent leurs fournisseurs et mettent en place des outils digitaux pour relier les factures fournisseurs aux émissions carbone des produits achetés. L’objectif est d’avoir un suivi précis et presque en temps réel des émissions de CO2 liées aux achats de produits et matières premières. C’est un travail gigantesque, il y a souvent plusieurs dizaines de milliers de fournisseurs. Saint-Gobain semble proche d’y parvenir, mais pour la plupart, ce projet est encore à ses débuts. Certaines d’entre elles commencent à « engager »leurs plus gros fournisseurs en leur expliquant comment ils peuvent les aider à réduire leurs émissions. Parfois des indicateurs tels que score CDP ou objectif SBTi commencent à être demandés aux fournisseurs (ex JDE Peet’s). Pour l’instant, cependant, nous n’avons pas vu d’entreprises prêtes à terminer une relation avec un gros fournisseur si ces indicateurs n’étaient pas conformes aux attentes. Ce n’est pas surprenant, être trop strict et voir le fournisseur privilégier un concurrent est une décision qui mérite réflexion.

Travailler sur le Scope 3 amont implique aussi de donner la priorité à des matériaux moins carbonés et au recyclage (ex. Covestro). Mais ces matériaux moins carbonés ont souvent un coût plus élevé. Eiffage donne l’exemple du béton bas carbone qui est plus cher et peut poser des problèmes de compétitivité lors d’appels d’offre où les clients donnent la priorité au prix. Covestro explique remplacer des matières premières à base d’énergie fossile par des matières premières « bio » mais cela prend du temps et peut parfois coûter 50% de plus. Ainsi, le mangement demande à la force commerciale d’identifier les clients les plus sensibles à la problématique carbone. Covestro estime qu’en Europe, 2/3 de ses clients ont une stratégie et des objectifs Scope 3, alors que cela démarre à peine aux Etats-Unis et en Asie. Enfin, diminuer la quantité de matières premières nécessaires est un autre levier d’action sur le Scope 3 amont. Vinci l’actionne avec l’ecodesign tout comme Verallia qui , en utilisant plus de calcin, réduit la quantité de matières vierges utilisées.

Scope 3 aval : influencer la demande

Sur le Scope 3 aval, parmi les sociétés rencontrées, la catégorie la plus importante est l’utilisation des produits vendus. C’est le cas des concessions autoroutières ou aéroportuaires, des avions d’Airbus ou du pétrole de Total Energies. Même si les entreprises ont un pouvoir d’action limité sur leur Scope 3 aval, il est raisonnable de penser qu’elles parviendront à le réduire. Les nouveaux avions d’Airbus sont 20-25% plus efficace en consommation énergétique, de plus la proportion de « fuel durable » (SAF) augmente progressivement. Total Energies profitera de ses investissements dans le gaz au détriment de ceux dans le pétrole. Vinci et Eiffage profiteront de l’électrification progressive du parc de véhicules légers. Enfin, dans certains cas, il est possible d’inciter directement les clients à modifier leurs habitudes. C’est le cas de Vinci qui, dans son activité aéroportuaire, expérimente un système de tarification des compagnies aériennes en fonction de leur consommation énergétique. Le système est basé sur les émissions de CO2 de chaque appareil sur son cycle LTO (landing and take-off) en fonction de sa motorisation. Selon le niveau d’émissions de CO2, un bonus ou un malus s’applique sur les redevances d’atterrissage.

Un autre élément intéressant du Scope 3 aval est l’étude du changement de comportement des clients au fur et à mesure que ces derniers mettent en place des objectifs de réduction de leur Scope 3 amont. Sur ce point, comme la plupart des sociétés scorent bien au CDP et ont des objectifs SBTi, nous ne sommes pas très inquiets. Cependant, il faut suivre leur capacité d’innovation pour offrir des produits qui réduisent le Scope 3 amont de leurs clients. Cela doit aussi s’accompagner d’une éducation des équipes commerciales car ces sujets deviennent des enjeux de part de marché. Ainsi, Saint-Gobain, comme Eiffage, sont bientôt capables de montrer l’impact carbone de leurs produits sur chaque devis. Saint-Gobain estime même que d’ici quelques années, une entreprise qui ne peut pas montrer cette information ne sera plus sélectionnée dans les appels d’offre.

3 POINTS D’AMÉLIORATION

Reporting interne

Dans l’ensemble, toutes ces réunions nous ont conforté dans la capacité de nos investissements à dérouler leur feuille de route pour décarboner leurs activités. Nous voyons trois points d’amélioration qui concernent la plupart d’entre elles. Le premier porte sur le« reporting carbone » interne. Beaucoup d’entreprises ont encore une comptabilité annuelle, certaines ont un reporting trimestriel et très peu ont un reporting mensuel. Pour bien piloter la stratégie de réduction de GES, il nous semble qu’un reporting trimestriel est nécessaire et nous voyons positivement les entreprises qui investissent dans leurs systèmes d’information pour y parvenir.

Reporting externe

Le deuxième point d’amélioration concerne le « reporting carbone » externe, à destination des investisseurs. Les dernières années ont porté sur la mise en place d’objectifs de réduction de GES. Les prochaines se focaliseront sur l’exécution de la stratégie pour y parvenir. Actuellement, le détail des sources d’émissions, l’historique de réduction des GES, les leviers d’amélioration par Scope et par métier sont encore rares. Les « bridge d’émissions » comme il existe des« bridge d’EBITDA » sont presque inexistants. Au fur et à mesure que les données s’améliorent, nous espérons que les entreprises pourront mettre en place ce genre de pratiques, dans le but d’augmenter la transparence de leurs stratégies.

Gouvernance

Le troisième point d’amélioration relève de la gouvernance et porte sur la politique de rémunération du Directeur Général ainsi que des équipes de management. Nos réunions ont montré que les objectifs macro de réduction de GES, ceux qui ont été validés par le SBTi et incarnent la stratégie climat des entreprises, sont rarement déclinés à l’identique dans la rémunération variable court terme et long terme. Il arrive qu’un KPI carbone soit présent, mais il est différent des objectifs officiels. Nous comprenons que, dans beaucoup de cas, cela est dû au fait que depuis l’annonce des objectifs officiels de réduction des GES, il n’y a pas eu de« remise à plat » de la politique de rémunération. Dans d’autres cas, certaines entreprises semblent réticentes pour des questions de qualité du reporting des données GES. En tant qu’actionnaires, en plus des KPIs financier, il nous semble pertinent de viser à aligner le « KPICO2 » de la rémunération variable avec les objectifs officiels de réduction des GES. Cela donne plus de crédibilité à la stratégie climat poursuivie.

Comptez-sur nous pour suivre les prochains développements sur ces sujets. Une stratégie crédible de gestion du changement climatique est une priorité pour la planète mais aussi pour l’entreprise. Cela lui permet d’être attractive auprès de ses collaborateurs, de prendre des parts de marché en comprenant les nouveaux besoins de ses clients et de réduire les risques de durcissement de la réglementation. L’entreprise renforce ainsi son modèle économique. Elle génère un cash flow pérenne et rémunère ses actionnaires par une politique équilibrée d’allocation du capital, entre investissements et dividendes.

November 7, 2022

Lettre de la gestion
Lettre ESG - Stratégie Climat des entreprises

L’approche ESG de BDL met un accent particulier sur la stratégie climat des entreprises en portefeuille. La nécessité de se séparer des énergies fossiles au profit des énergies renouvelables remet en question les modèles économiques des entreprises. En tant qu’actionnaires, nous nous assurons que les sociétés en portefeuille renforcent leurs modèles d’affaires en :

1. Décarbonant leurs activités

2. Saisissant les opportunités commerciales liées à la transition.

Trimestriellement, nous partageons avec vous les initiatives et les tendances que nousavons identifiées chez nos entreprises. Les sociétés citées représentent environ la moitié des émissions des portefeuilles BDL Rempart et BDL Convictions, fonds PEA.

Bon pour la planète, bon pour l’actionnaire

Contexte

L’approche ESG de BDL met un accent particulier sur la stratégie climat des entreprises en portefeuille. La nécessité de se séparer des énergies fossiles au profit des énergies renouvelables remet en question les modèles économiques des entreprises. En tant qu’actionnaires, nous nous assurons que les sociétés en portefeuille renforcent leurs modèles d’affaires en :1. Décarbonant leurs activités2. Saisissant les opportunités commerciales liées à la transition. Trimestriellement, nous partageons avec vous les initiatives et les tendances que nous avons identifiées chez nos entreprises. Les sociétés citées représentent environ la moitié des émissions des portefeuilles BDL Rempart et BDL Convictions.

1. Décarbonation des modèles économiques

Energies renouvelables : les capacités augmentent, nos entreprises en profitent

Total Energies a finalisé l’acquisition de 50% de Clearway Energy Group aux Etats-Unis et annoncé une nouvelle acquisition d’une participation dans un portefeuille de plus de 12 GW de projets solaires et éoliens terrestres au Brésil. Le groupe a aussi démarré la centrale solaire d’Al Kharsaah de 800 MW au Qatar. Le niveau de 500 MW de capacités de production solaire distribuée (toits, ombrières, etc.) dans le monde est atteint. La capacité brute installée de génération électrique renouvelable atteint 16,0 GW à la fin du troisième trimestre2022 en hausse de 4,4 GW sur le trimestre.

Mercedes a lancé le projet de création d’un champ d’éoliennes avec un capacité de 100MW à Papenburg qui couvrira plus de 15% des besoins en électricité du groupe en Allemagne d’ici2025-2026. Cela confirme une tendance que nous avons déjà remarquée chez d’autres acteurs industriels : investir dans leurs propres infrastructures de génération d’énergie renouvelable.

Saint-Gobain a signé un PPA aux Etats-Unis avec Total Energies qui couvrent 145 sites industriels à partir d’énergie solaire. Ce PPA est clé pour permettre à Saint-Gobain d’atteindre son objectif de réduction des émissions de Scope 2 de 30% d’ici 2030. Si on ajoute le 1er PPA éolien signé à Bloombing Grove (Illinois) cela fera baisser les émissions Scope 2 de Saint-Gobain de 62% aux Etats-Unis En Pologne aussi, un contrat d’énergie renouvelable a été signé qui couvrira les besoins en électricité du groupe de 45% d’ici 2025.

Maersk a annoncé une nouvelle commande pour 6 navires qui fonctionnent au méthanol vert. Le groupe a désormais 19 navires qui peuvent naviguer avec du méthanol vert. À la suite d’une commande de 400 camions électriques aux Etats-Unis plus tôt dans l’année, Maersk a aussi rejoint l’initiative EV100+ comme membre fondateur. L’objectif de l’initiative est de faire disparaître progressivement les véhicules les plus polluants. Actuellement, les poids lourds représentent seulement 4% des véhicules routiers mais sont à l’origine de 40% des émissions de CO2 du secteur du transport routier.

Capture et stockage du CO2 : un premier accord transfrontalier de référence

La croissance de cette thématique est particulièrement importante. Dans les scénarios du GIECC, toutes les émissions de CO2 ne pourront pas disparaitre à horizon 2050. Certains modèles industriels ne seront pas entièrement décarbonés. Certaines analyses estiment que les technologies de capture et de séquestration du CO2 devront représenter jusqu’à 15% des émissions actuelles.

A la fin de l’été, Northern Lights, un partenariat entre Equinor, Total Energies et Shell, a signé un premier accord commercial pour le transport et le stockage de CO2 sous la mer, à l’Ouest de la Norvège. C’est le premier accord transfrontalier de ce type. Northern Lights transportera et stockera le CO2 émis par l’usine hollandaise de Yara, le producteur d’ammoniac. Cet accord établira les standards pour d’autres entreprises industrielles qui cherchent à décarboner leurs opérations.

Total Energies a signé un protocole d’accord avec Holcim pour un projet pilote de décarbonation d’une cimenterie en Belgique. Le groupe a aussi obtenu une licence de séquestration de CO2 en Australie, en partenariat avec INPEX et Woodside.

Opportunités commerciales

Maersk a indiqué que la forte demande pour Maersk Eco delivery a continué avec des volumes quatre fois plus élevés qu’au T3 2021. Cette offre permet aux clients de payer une « prime verte » pour une livraison bas carbone avec un certificat d’économie d’émissions de CO2. Ce succès commercial confirme le travail croissant des entreprises sur leur Scope 3 et notamment leur chaîne d’approvisionnement.

Rexel a publié des ventes T3 à un niveau record et en croissance annuelle de 16.3%. Rexel indique bénéficier des tendances à l’électrification et de la demande croissante pour les produits et les solutions d’efficacité énergétique. Sur les catégories de produits comme le photovoltaïque ou les véhicules électriques, la croissance est supérieure à la moyenne du groupe.

Saint-Gobain a encore montré ses capacités d’innovation. Le groupe a présenté une première mondiale avec une production zéro carbone de plaques de plâtre dans son usine de Balsta alimentée au biogaz et avec de l’électricité verte. De même Saint-Gobain a conçu la première plaque de plâtre à partir de plus de 50% de plâtre recyclé. L’entreprise a aussi signé un Partenariat avec Megasol, le leader européen des modules solaires intégrés aux bâtiments, un marché en forte croissance. Enfin, Saint-Gobain a continué le déploiement d’une offre de verre bas carbone à haute efficacité énergétique très appréciée des promoteurs immobiliers. Nous encourageons nos entreprises à signer des PPA, c’est un mécanisme plus robuste que les crédits carbone.

Reporting extra-financier

Nous tenons à saluer l’initiative de Covestro qui depuis cette année a ajouté un 4ème KPI trimestriel en plus des trois existants (EBITDA, FCF, ROCE). Le groupe a choisi de publier trimestriellement ses émissions de GES. Covestro rejoint Total Energies qui publie ses émissions trimestriellement depuis le T2 2021 pour le CO2 et le T1 2022 pour le méthane. Ces pratiques sont très importantes pour au moins deux raisons :• Covestro et Total Energies montrent que leur système de comptabilité est très avancé et leur permet d’avoir des données trimestrielles d’émissions GES. Cela est encore très rare et permet aux deux groupes de mieux piloter leurs stratégies de décarbonation.• Les deux entreprises élèvent le niveau des meilleures pratiques et stimulent ainsi d’autres sociétés à améliorer la publication de leurs émissions GES. Ce trimestre confirme que les sociétés les plus émettrices de notre portefeuille sont très actives dans la décarbonation de leurs activités. On remarque, avec la croissance des accords pour de l’énergie renouvelable, que nos entreprises sérieusement à leur Scope 2. Cela devrait aider à la réduction annuelle de leurs émissions de GES. Nous voyons aussi un cercle vertueux s’enclencher car la plupart de nos entreprises ont désormais annoncé des objectifs officiels de réduction de GES et doivent maintenant dérouler leur feuille de route pour y parvenir. L’importance croissante du Scope 3 (nous y reviendrons dans une autre étude) accélèrera la demande finale pour des produits bas carbone. Il est de notre rôle de nous assurer que nos entreprises investissent suffisamment pour profiter de cette tendance.

November 4, 2022

Tribunes
Les indices climatiques : une simplification illusoire et dangereuse

Depuis les Accords de Paris en 2015, le plus grand défi de notre génération est bien connu: interrompre le réchauffement climatique avant que ses conséquences sur la planète ne soient irréversibles.

La cause principale de ce réchauffement est acceptée : les émissions de gaz à effet de serre (GES), principalement le CO2. Pour respecter les Accords de Paris, Il faut éliminer ces émissions de GES d’ici 2050.

Depuis plusieurs années, les gouvernements, les entreprises et les acteurs financiers annoncent des objectifs de réduction de leurs GES d’ici à 2030. Pour des raisons de communication, chaque acteur cherche à afficher l’objectif le plus ambitieux possible… les promesses n’engagent que ceux qui les croient. Devant cette multitude d’informations, il est difficile de savoir vers qui se tourner si l’on veut investir en participant à la lutte contre le réchauffement climatique.

En 2020, le régulateur a souhaité répondre à ce besoin en créant des indices climatiques alignés sur la trajectoire des Accords de Paris, les « Paris Aligned Benchmarks ». Ces indices vous promettent que les entreprises sélectionnées ont non seulement une intensité des émissions de GES moitié moins élevée que celle de l’économie en général mais aussi que cette intensité baissera de 7%par an. C’est une proposition très séduisante : sans rien faire, on se donne bonne conscience en investissant son argent dans des fonds qui suivent ces indices.

Comme souvent, les solutions qui semblent trop belles pour être vraies sont effectivement fausses. C’est le cas de ces indices climatiques. Tout d’abord leur objectif porte sur une réduction de l’intensité des émissions de GES alors que la planète a besoin d’une réduction absolue des émissions. Ces indices peuvent donc remplir leur promesse alors que le montant absolu des GES monte et que le réchauffement climatique s’aggrave.

Ensuite, pour promettre une intensité d’émissions inférieure de moitié à l’économie dans son ensemble, ces indices excluent la plupart des entreprises actives dans le charbon, le pétrole, le gaz naturel ainsi que les utilities dont l’intensité carbone est supérieure à 100 gCO2/KWh. Les secteurs les plus émetteurs de GES peuvent donc continuer à émettre autant, voire plus, sans que cela n’ait d’incidence sur la promesse des indices climatiques, une aberration.

Enfin, pour tenir la promesse d’une réduction de l’intensité des émissions de 7% par an, les gestionnaires de ces indices construisent des algorithmes qui optimisent le poids des entreprises en fonction de leurs émissions. En « assemblant le puzzle différemment », il est ainsi possible de tenir cette promesse sans qu’aucune entreprise de l’indice ne baisse son intensité de 7% par an, encore moins ses émissions absolues.

Pour résumer, ces indices climatiques, en voulant trop simplifier les choses, avancent des promesses qui sont trompeuses. En suivant ces indices pour se donner bonne conscience, l’investisseur se cache les yeux et se bouche les oreilles pour ne pas voir le problème. C’est un comportement dangereux car il retarde la gestion efficace du réchauffement climatique.

A l’opposé, pour l’investisseur responsable et clairvoyant, affronter la réalité en face est la seule solution. Il faut s’engager auprès des sociétés, encore plus auprès des plus émettrices, pour les pousser à se réinventer et à accélérer la réduction de leurs émissions. Pour cela il ne faut pas utiliser un indice fictif mais la boîte à outil du vrai actionnaire : le dialogue, le vote et le dépôt de résolution. Jamais la présence de gérants actifs, investis et engagés n’a été aussi importante.

September 9, 2022

Tribunes
Pour un ESG "utile"

« Il vaut mieux avoir à peu près raison que précisément tort ». Même si cette phrase, attribuée à John Maynard Keynes, a été prononcée bien avant que le terme ESG n’existe, elle résume bien certains des excès présents dans l’écosystème ESG.

L'ESG : une réalité souvent complexe

Les plus fervents défenseurs de l’ESG ont souvent une pensée dogmatique, un sujet est noir ou blanc. Or, la réalité est presque tout le temps grise. Que doit-on penser d’un véhicule électrique qui est rechargé avec de l’électricité produite à partir de charbon ? Faut-il construire des parcs éoliens en masse sachant que les écosystèmes locaux seront forcément impactés et déstabilisés ? Quel est le bon taux de rotation des employés ? un chiffre très bas témoigne d’une grande fidélité mais aussi d’une absence de sang neuf nécessaire à l’entreprise pour innover et se remettre en question ?

Les exemples similaires sont innombrables. Pour faire face à ce dilemme, les investisseurs s’en remettent souvent à des agences de notations externes. Grâce à l’usage d’une multitude d’indicateurs, et de méthodes de scoring particulièrement complexes et confuses, ces organismes veulent faire autorité dans le monde de la notation ESG des entreprises. Malgré la complexité de leurs approches, elles peinent à établir un consensus. La preuve a été apportée par une étude des scores ESG de 400 entreprises par 6 fournisseurs différents. La corrélation entre les notes ESG de MSCI, S&P et Sustainalytics était inférieure à 50%. A titre de comparaison, les notes attribuées à la dette long terme par les trois agences principales de notation de crédit est de 94-96%.

L’ESG est donc un sujet complexe où le risque est d’avoir « précisément tort » si l’on s’en tient à remplir des cases dans une grande feuille Excel. De même qu’un bon investisseur analyse des faits et agit avec discernement, l’ESG « utile » doit aussi se baser sur des faits et les analyser en pesant le pour et le contre. Il doit aussi donner la priorité à ce qui suscite le moins de débat, c’est-à-dire le E de ESG. Comme dans l’édition de The Economist (23/07/2022), on pourrait même résumer le E à émissions et on aurait « à peu près raison ». Le changement climatique est désormais accepté par la plupart d’entre nous, de même que sa cause : les émissions de gaz à effet de serre. C’est le plus gros défi à résoudre, et c’est là que les données sont les plus fiables, mais si elles peuvent encore s’améliorer. Analyser la trajectoire des émissions de GES d’une entreprise n’est pas spécialement compliqué et le diagnostic entredeux investisseurs qui regarderaient les mêmes données serait probablement le même. Le E est donc le sujet le plus important et il se prête à une analyse objective des faits, il est donc raisonnable d’en faire la priorité d’une analyse ESG. Pour aider à faire « bouger les lignes » les investisseurs doivent ensuite dialoguer avec l’entreprise pour s’assurer que les efforts sur le E sont rapides, bien gérés et bien documentés.

Pour un ESG "utile" et pragmatique

Un autre dogme de l’ESG est de n’investir que dans des entreprises qui sont déjà « parfaites » en ESG et de « boycotter » les autres. En reprenant l’exemple du E, cela revient à ne sélectionner que des entreprises qui n’émettent pas ou très peu de GES. Cette stratégie donne bonne conscience mais ne résout en rien la problématique du climat. Elle ne semble même pas offrir une meilleure performance. Une étude de l’ESMA (23/05/2022) montre qu’entre 2019 et 2021, les fonds avec une empreinte carbone élevée avaient de meilleures performances que les fonds avec une empreinte carbone faible. Tant mieux, car l’effort « utile »est d’accompagner les entreprises les plus émettrices pour qu’elles réduisent leurs émissions à un rythme soutenu et compatible avec les Accords de Paris. A ce titre, des coalitions d’investisseurs comme CA100+ ou Say on Climate, qui poussent les sociétés à accélérer leur trajectoire de réduction des GES, sont des initiatives beaucoup plus efficaces pour faire changer les choses.

Les sources d’un ESG « utile » se trouvent dans l’analyse factuelle et pragmatique, l’engagement actionnarial sur un ou deux sujets prioritaires et la mesure des progrès de l’entreprise dans le temps. Un ESG pratiqué de cette façon est certes plus simple qu’un score ESG complexe (utilisé principalement pour du reporting) mais il a plus de chances d’être utile et d’avoir « à peu près raison ».

June 2, 2022

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