Retrouver notre souveraineté européenne : l’immanquable opportunité ?

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   Publié le  
July 25, 2025
 par 
Laurent Chaudeurge

Retrouver notre souveraineté européenne : l’immanquable opportunité ?

Lors des 10 dernières années, les investisseurs européens ont progressivement abandonné la gouvernance de leurs entreprises aux américains. Ce triste constat est la conséquence de leur appétit grandissant pour les actions internationales (américaines au premier plan) et de l’essor continue de la gestion passive.

Sur 10 ans, les européens ont progressivement cédé 10% du capital des entreprises européennes aux étrangers, notamment aux américains, et le poids de la gestion passive a doublé pour atteindre la moitié des encours gérés en gestion collective et plus des deux tiers des capitaux des investisseurs institutionnels.

Aujourd’hui, les investisseurs américains représentent près de 25% du flottant* des entreprises européennes. Mais, sous l’effet de la gestion passive, l’influence des Etats-Unis dans la gouvernance de « nos » entreprises est probablement le double, soit la majorité du capital circulant.

En effet, la gestion passive est un oligopole de trois gestionnaires d’actifs américains (Blackrock, Vanguard, State Street) qui appliquent des principes de gouvernance génériques imposés par 2 agences de votes américaines (ISS et Glass Lewis). Cela signifie que l’immense majorité des encours en gestion passive ou semi-passive votent en AG selon des conseils prodigués par ces organismes américains. Quand le poids de la gestion passive était faible, cette situation n’avait pas de conséquences sur notre souveraineté. Désormais, que ce soit en gestion collective ou chez les investisseurs institutionnels, comme la gestion passive est devenue la méthode d’investissement majoritaire, les intérêts américains au capital des entreprises européennes sont aussi devenus majoritaires.

À la suite de son élection, D.Trump a eu le mérite de nous faire comprendre rapidement et brutalement que nous ne pouvions compter que sur nous, européens, pour assurer notre souveraineté à long terme. Les Etats ont réagi, notamment concernant les dépenses militaires. L’Allemagne en tête, avec son plan de relance de 1000 milliards d’euros sur 10 ans, a montré qu’il fallait oser s’émanciper de nos propres règles historiques pour nous inventer un futur autonome et souverain.

Il faut en faire de même concernant le capital de nos entreprises européennes. Affaibli par une politique économique à géométrie variable, un endettement démesuré qui impose plus de restriction budgétaire, et une administration qui pense que le dollar est trop fort, l’exceptionnalisme américain faiblit dans l’esprit des investisseurs.  Pour la première fois depuis cinq ans, les souscriptions sur les fonds actions américaines stagnent alors qu’elles redémarrent (enfin) sur les actions européennes.

De plus, la concentration des indices est à un plus haut historique, ce qui, par le passé, a coïncidé avec plusieurs années favorables à la gestion active. Enfin, le MSCI World ne remplit plus son vraiment son rôle, il est devenu de facto le « MSCI USA »puisque les Etats-Unis représentent 75% de l’indice alors que le PIB américain ne représente que 25% du PIB mondial.

Tout indique qu’il faut à la fois revisiter les perspectives européennes et sortir du diktat de la gestion passive pour reprendre le contrôle de « nos » entreprises. La gestion passive démocratise l’investissement en actions à faible coût et maintient une forte exigence sur la gestion active. Mais quand son poids devient excessif, cela mène inévitablement à l’indigestion. Nous y sommes.

La seule façon de préserver notre souveraineté européenne est de contrôler la gouvernance de nos entreprises et donc d’être largement majoritaires à leur capital. Il n’y a qu’une seule voie pour y parvenir : orienter à nouveau une partie de nos capitaux sur les actions européennes et remettre en question le poids raisonnable de la gestion passive dans nos investissements. Les marchés cotés européens offrent actuellement de nombreuses entreprises de qualité à des prix très raisonnables, parfois même à des prix historiquement bas.

L’opportunité de retrouver notre souveraineté est là, devant nous, immanquable. Saisissons là en osant être des actionnaires convaincus de nos entreprise européennes.

 

*Flottant : part du capital d’une entreprise cotée en bourse qui est réellement disponible à l’achat et à la vente quotidiennement sur les marchés

Retrouver notre souveraineté européenne : l’immanquable opportunité ?